Vous allez lire la nouvelle fantastique de Oumati Mataiki, élève de 4°2, nouvelle rédigée pendant cette période difficile de confinement.
Bonne lecture,
Mme Chevalley
Je fis ce jour-là une expérience singulière. Cela se passa l'hiver dernier, dans le chalet que nous avions hérité de ma mère, ma femme et moi, juste après son décès. Il était sur pilotis car il était au-dessus d'une rivière. Le matin, c'était agréable d'entendre le cours d'eau. Même un an après, malgré mon amnésie, je me souviendrai, même au-delà de ma mort, de cette histoire effroyable et terrifiante…
Ce chalet se trouvait près de Reims, dans un petit village où seuls les détectives les plus curieux et courageux iront enquêter sur cette tragique histoire. Je ne peux pas dire que notre demeure était grande, mais cela nous suffisait. Elle était calme, agréable, et nous étions heureux, tellement heureux ! Nous allions nous promener, tous les matins, le long de la rivière, puis nous déjeunions sur la terrasse que nous utilisions souvent car nous avions peu de jardin. Notre chambre, elle, était immense. À gauche de la porte d'entrée, il y avait une grande bibliothèque, contenant une collection d'ouvrages sur les phénomènes paranormaux qui appartenait à ma mère, ainsi que mes manuels de botanique. À côté, se trouvaient notre lit, ma table de chevet. Au-dessus, nos portraits de mariage, et en face, une grande fenêtre qui donnait sur la rivière. Le dressing longeait tout le mur du fond. Là, se trouvait une chaise que ma femme utilisait pour s'habiller à cause de ses problèmes de dos. À droite de la fenêtre, reposait un lourd et large coffre en bois fermé dont je n'avais pas la clé. Les murs étaient blancs et la moquette couleur chair amenait de la douceur.
J'aimais, de temps en temps, regarder les photographies de notre mariage : je pouvais rester des heures à nous admirer, jeunes, insouciants, sans songer à cette chose qui me hante maintenant toutes les nuits…
J'étais grand, brun, musclé et mes yeux, toujours aussi marron foncé. Mais, en me regardant le soir dans le miroir, je ne voyais que mes rides, ma calvitie, mes cheveux blancs, ma vieillesse...
La première fois que cette chose effroyable arriva, ce fut après le souper. Nous étions fatigués, ma femme et moi, et nous décidâmes d'aller nous coucher tôt. Ma femme prit un somnifère car ses acouphènes la faisaient particulièrement souffrir ce soir-là. Après avoir mis mon pyjama, je me couchai, posai mes lunettes sur la table de chevet, et j'éteignis ma lumière. Le sommeil ne me venait pas et un mal de tête atroce me prit. Je décidai d'aller chercher un médicament dans la cuisine.
Je n'allumai aucune lumière pour ne pas réveiller ma femme. Dans la cuisine, un froid soudain me prit : j'avalai mon cachet et, me dirigeant vers ma chambre, je vis clairement la moquette onduler. Ce n'était pas seulement des ondulations, la moquette dansait, elle faisait comme des vagues. Je... je ne rêvais pas... ce n'était pas possible... je ne savais que penser...
De peur, j'allumai la lumière de la chambre et ma femme sursauta :
- Mais qu' y a-t-il Claude ?
- Regarde..., lui dis-je en pointant du doigt la moquette.
- Eh bien, il n'y a rien, qu'est-ce qu'il t'arrive?
Je vis avec stupeur que la moquette n'ondulait plus.
- Non, c'est rien, ça doit être ce fichu mal de tête.
J'éteignis la lumière et me faufilai dans mon lit. Je me rassurai en me disant que c'était bien mon mal de tête qui m'avait joué un mauvais tour.
Le lendemain, après avoir pris le petit déjeuner, nous nous promenâmes le long de la rivière. Sur le chemin, nous cueillîmes des champignons, des pommes et des fleurs. Notre amour était si pur, si important pour moi que, sans elle, je n'étais plus rien. Nous étions toujours aussi amoureux malgré le temps qui avait passé. Cinq jours plus tard, nous allions fêter notre trentième anniversaire de mariage. Je voulais lui faire la surprise d'une promenade en barque sur la rivière. Nous pique-niquerions, nous nous câlinerions… mais jamais je n'aurais pensé que ces instants merveilleux n'arriveraient pas…
J'étais certain que ce que j'avais vu la nuit dernière n'était qu'une illusion. Mais cette nuit-là (ma femme dormait déjà), je venais d'éteindre ma lampe de chevet quand, brusquement, j'entendis un bruit provenant du coffre en bois. Intrigué, je me levai et je vis de mes propres yeux la moquette onduler. J'allumai avec une impressionnante rapidité la lumière, mais exactement comme la nuit précédente, le phénomène s'arrêta. Pris d'une peur bleue, je me réfugiai sous la couette. J'étais pétrifié, comme un enfant qui avait vu un fantôme au pied de son lit. Je décidai de ne pas en parler à Jeanne, je craignais qu'elle ne me prenne pas au sérieux.
Je n'avais pas dormi de la nuit. Des scènes horribles n'arrêtaient pas de me tourmenter. J'essayais de comprendre ce qu'était cette chose. Jeanne se réveilla et s'étonna de me voir déjà levé. Je lui répondis que j'avais eu une migraine et que je n'avais pas pu fermer l'oeil de la nuit.
Le phénomène se répéta plusieurs nuits, et je n'en avais toujours pas parlé à Jeanne. Je pensais sans arrêt à cette chose. Était-elle réelle...? Que voulait-elle ? Ou était-ce seulement une hallucination ? Je restais l'après-midi entier sur la terrasse à lire Cas de maisons hantées que j'avais repéré dans la collection de ma mère. Je pensais que cela m'aiderait à comprendre mais on n'y parlait pas de cas similaires, cela m'intriguait encore plus.
Quand la nuit arriva, l'angoisse revint, je me couchai avec ma femme comme si de rien n'était et attendis qu'elle s'endorme. Un peu plus tard, le sommeil ne venant toujours pas, je me levai et me dirigeai vers la salle de bain qui se trouvait juste en face de la chambre. Assis sur le rebord de la baignoire, les lumières éteintes. J'avais les yeux rivés sur la moquette de la chambre et j'étais bien décidé à surprendre cette chose, à l'attendre toute la nuit s'il le fallait : il fallait que je sache.
Plusieurs heures à attendre, rien.
Cette chose savait que je l'observais, elle m'échappait.
Je décidai donc de changer de stratégie. Je montai au grenier et pris quelques boules qui étaient restées là, sur mon vieux billard. Je repartis dans la chambre, Jeanne dormait toujours. Je plaçai les boules en paquet en plein milieu de la moquette. Je me recouchai, éteignis la lumière. Je finis par m'endormir quand, tout à coup, j'entendis frapper dans le coffre. Je sursautai, allumai la lumière, et vis avec effroi les boules éparpillées sur toute la moquette. Je récupérai toutes les boules, de peur que Jeanne ne me prenne pour un fou et, pris d'une colère soudaine, je les jetai par la fenêtre. Je restais là un moment, perdu.
C'était sûr, la moquette bougeait. Qu'est-ce qui la faisait bouger ? Mais quel était le lien entre la moquette et le coffre ? Qu'y avait-il dans ce coffre ? Quelle était cette chose ? Était-ce un fantôme ? Mais que voulait-il ? Avait-il besoin de moi ? Était-il malfaisant ? Je ne supportais plus toutes ces incertitudes, je n'arrivais plus à garder ce secret. Il fallait que je dise la vérité à Jeanne.
- Jeanne, Jeanne ! Réveille-toi ! Il faut absolument que je te parle ! Jeanne !
- Mmmh...? Mais qu'y a-t-il Claude ? Mais que t'arrive-t-il ?
- Il se passe des choses très étranges dans cette maison, je ne voulais pas t'en parler pour ne pas t'inquiéter mais je viens d'avoir la preuve qu'une Chose vit chez nous. Je ne sais pas ce que c'est exactement, mais cela me terrifie.
- Mais enfin Claude, quelle Chose ?
- La moquette ondule toutes les nuits, le vieux coffre en bois fait des bruits étranges et je l'entends frapper.
- Mais, enfin Claude, je n'ai jamais vu, ni entendu quoique ce soit d'étrange ici.
- C'est normal, ça se produit la nuit, quand tu dors, cette chose veut me rendre fou !
- Mais Claude, tu m'inquiètes beaucoup, j'ai bien vu que depuis quelque temps tu n'es pas dans ton état normal. Je pense que tu prends beaucoup trop de médicaments. Il faudrait en parler au médecin. Peut-être que tes médicaments te font avoir des hallucinations.
- Mais non, je prends ces médicaments pour m'aider à dormir, pour me calmer. C'est cette Chose qui me rend fou ! Pitié Jeanne, crois-moi ! Les boules, elles étaient éparpillées, j'ai eu la preuve !
- Mais quelles boules ? Mais de quoi parles-tu, enfin ?
- Voilà, je savais que tu n'allais pas me croire, que tu me prendrais pour un fou, c'est ce que je ne voulais pas.
- Claude, essaie de te calmer, repose-toi, ne t'inquiète pas, je suis là, mais promets-moi que demain nous irons voir le Dr Arnault.
J'acceptai mais, au fond de moi, j'étais terriblement déçu que ma propre femme ne me croie pas. Et si c'était elle qui avait raison, c’était peut-être des hallucinations ou étais-je devenu fou ?
À ce moment-là, je ne savais pas que c'était la dernière fois que je lui parlais...
Jeanne disparut.
Je n'eus aucune nouvelle de ma femme durant deux semaines.
Cette situation me terrifiait. Elle me manquait énormément. Je repensais à notre rencontre, notre mariage. On s'aimait tant ! Je ne dormais plus. Je ne mangeais plus. Je l'attendais toute la journée devant la porte.
Toutes les nuits, la moquette ondulait, le coffre frappait.
Je n'en pouvais plus. Je devais me venger.
Cette nuit-là, je frappais la chose encore et encore à coup de chaise, alors que le coffre tapait de plus en plus fort. Il fallait en finir. J'arrachai la moquette.
Dessous, une petite clé. Celle du coffre ?
La main tremblante, je réussis à l'ouvrir. Le cadavre de Jeanne...
Qui l'avait tuée ?
La chose ?
Moi ?
Je ne savais trop que penser...